Transformer des pneus usagés en pétrole

L'entreprise franco-allemande, Pyrum Innovations, utilise le procédé de thermolyse pour recycler des vieux pneus et les transformer en énergie réutilisable. Le groupe vient de décrocher le Grand prix du Sénat au dernier concours Lépine.

L'avenir des pneus usagés se jouera sûrement en Sarre. C'est dans cette région de l'ouest de l'Allemagne, dans la ville de Dillingen, près de la frontière française, que la société franco-allemande Pyrum Innovations a installé sa première unité industrielle capable de transformer les vieux pneus usagés en énergie réutilisable. Plus précisément en pétrole, coke et gaz. Une innovation qui vient d'être primée du Grand prix du Sénat du concours Lépine 2015.

Pour recycler les pneus, cette société utilise le procédé de thermolyse ou décomposition thermique. Les granulats de pneus sont chauffés à 700 degrés dans un four vertical haut de 25 mètres. Dans une atmosphère sans oxygène, les déchets de gomme se transforment en hydrocarbures. «Le pétrole se forme dans la partie de condensation des molécules», précise Pascal Klein, 28 ans, l'un des fondateurs de Pyrum, aujourd'hui PDG de cette jeune pousse. Après raffinage, le pétrole obtenu peut être transformé à 60% en équivalent diesel, à 30% en équivalent essence et à 10% en solvants, assure-t-il.

Avec cette première unité industrielle, Pyrum se dit capable de transformer 5000 tonnes de pneus usagés par an. En plus du pétrole, qui représente 50% de l'énergie obtenue par recyclage, la société affirme pouvoir dégager 38% de coke et 12% de gaz. Ce dernier sert à alimenter l'immense groupe électrogène du site qui fonctionne ainsi en autarcie énergétique.

Un marché à fort potentiel

Les quatre fondateurs de cette société, Pascal Klein (PDG), Julien Dossmann (directeur général), Michaël Kapf et Stephan Adams, travaillent depuis plusieurs années sur cette idée qui a vu le jour en septembre 2007 à Pfettisheim, en France. Leur projet a séduit OSÉO, la région Alsace et le Fonds européen de développement régional qui leur ont accordé en 2010 un coup de pouce de 420.000 euros. Pour accélérer son développement, la même année, Pyrum vend 5% de son capital à des investisseurs privés séduits par le procédé. Dix personnes viennent alors renforcer l'équipe. «De nombreuses sociétés vinrent nous rencontrer dans le but de tester leurs déchets dans notre procédé. La plupart comptaient parmi les grands noms de la manufacture de pneus, bitumes, plastiques et pétroles», écrivent les entrepreneurs sur leur site.

Le tournant aura lieu en 2011, avec la visite du Commissaire européen à l'énergie Günther Oettinger, dans les locaux de Dillingen. La même année, ils obtiennent une enveloppe d'aide de 985.000 euros de la part de l'Union européenne. De quoi lancer leur unité industrielle. Quatre ans et dix millions d'euros d'investissements plus tard, Pyrum Innovations se dit prêt à commercialiser sa technologie.

Les quatre fondateurs croient dur comme fer au potentiel écologique et économique de leur projet. Ce dernier est en effet énorme. Selon l'Agence de l'Environnement et de la maîtrise (Ademe), 17 millions de tonnes de pneus usagés sont générés chaque année dans le monde, dont 350.000 tonnes en France. Leur recyclage permet déjà de fabriquer des combustibles alternatifs dans des cimenteries ou des centrales thermiques. Dans une moindre mesure, les pneus recyclés sont réutilisés pour des fondations de route, du mobilier urbain ou des cloisons antibruit.

Les fabricants de pneus dans la course

Pyrum Innovations devra en tout cas faire face à une concurrence féroce de la part des fabricants de pneumatiques qui réfléchissent aussi à la meilleure manière de réutiliser les pneus en fin de vie. Certains taclent déjà la jeune pousse: «la viabilité de leur modèle industriel n'est pas encore démontrée» et leurs produits «sont de moins bonne qualité et n'arrivent pas à passer en termes de prix», estime Jean-Philippe Faure, directeur de la recherche-développement d'Aliapur, acteur de référence dans la valorisation des pneus usagés en France.

De son côté, Michelin s'est lancé l'an dernier dans un ambitieux programme de recherche d'une durée de 8 ans avec le concours de l'Ademe, du CEA et de deux autres entreprises (Proteus et SDTech). Son budget: 51 millions d'euros. Baptisé TREC, ce projet vise une double valorisation: la première consiste en la régénération de mélanges de gomme pour la fabrication de pneumatiques neufs et la seconde prévoit de fabriquer du caoutchouc synthétique avec du butadiène biosourcé, à partir d'un alcool généré par la fermentation d'un gaz de synthèse. «Les matériaux de demain devront avoir des propriétés bien plus intéressantes que celles d'aujourd'hui», prévient Thierry Willer, directeur de la communication scientifique et technique chez Michelin.

source : http://www.lefigaro.fr/societes/2015/05/12/20005-20150512ARTFIG00192-comment-une-start-up-fabrique-du-petrole-avec-des-pneus-usages.php
NB : il faut être lucide, des décharges sont remplies de pneus usagés, ce problème doit être réglé